Synopsis
Compiègne : la troupe est en plein préparatifs, on règle encore une fois le spectacle pour bien le maîtriser et l’expliquer, on choisit les costumes, on pèse les bagages, on échange avec ceux de là-bas sur les ultimes détails, on s’interroge aussi non sans appréhension sur ce qu’on va y trouver, et finalement on s’embarque à Roissy à destination du Kurdistan Irakien.
Ce sera une sorte de voyage initiatique, à la découverte pour les jeunes Français, d’une culture, d’une histoire, d’un peuple. Pour les jeunes Syriens et Kurdes et qui n’ont pour la plupart jamais voyagé très loin c’est une expérience qui va peut être changer la vie de certains d’entre eux.
Dans un Irak divisé et instable depuis l’invasion par la coalition menée par les États-Unis et la chute de Saddam Hussein, les Kurdes, au nord, ont malgré tout tiré leur épingle du jeu géopolitique à partir de 1992 : maintien dans la nation Irakienne mais forte autonomie politique et économique, armée (les fameux Pershmergas), police, justice, éducation etc…).

D’abord c’est la rencontre qui se déroule à Erbil, la capitale, sous l’égide de l’Institut Français d’Erbil, et dont le directeur, Paul Léandri, est l’instigateur. Le spectacle va être recréé pendant une semaine avec une troupe constituée de Français de la compagnie, d’étudiants en Théâtre de l’Institut des Beaux Arts (quatre garçons et 3 filles) et leur professeur, puis quatre jeunes réfugiés Syriens qui ont fuit la conscription de l’armée de Bachar El Assad. En renfort viendront 2 traducteurs et 2 techniciens régie son et lumière. Les décors, dont le fameux tunnel mobile ont été fabriqués sur place par des artisans.

Par 40°, à l’extérieur et dans un amphithéâtre de l’institut libre pendant les vacances, l’organisation va commencer par la distribution des rôles, la présentation du dispositif, du récit visuel, de l’apprentissage du jeu d’acteur particulier, et des répétitions des différents tableaux.
L’ambiance, spontanément chaleureuse, va pourtant connaître des hauts et des bas au cours de la semaine avec les difficultés qui se font jour. Certaines sont d’ordre culturel, social ou religieux : une partie des costumes prévus ne sont pas convenables pour les filles, ils ne sont pas satisfaits des rôles attribués ou ne veulent pas jouer certaines scènes où ils se sentent dévalorisés, il faudra faire quelques adaptations.
Après quelques jours un relâchement se ressent, le groupe n’écoute pas toujours avec précision les instructions de Vincent qui doit pousser des coups de gueule impressionnants.
A cela s’ajoute une grande difficulté de communication : il faut traduire les instructions de Vincent du Français en Sorani (le dialecte kurde parlé à Erbil), puis en Anglais pour les Syriens qui ensuite se le traduisent en Arabe entre eux, quelques fois les interprètes disparaissent sans prévenir, on perd du temps et il fait très chaud.
Les quatre Syriens, que nous ne tarderons pas à appeler les Mousquetaires, Eyad, Mansoor, Magid et Latsh, sont plus mûrs, plus attentifs, leur histoire est aussi plus difficile, on les sent motivés pour des raisons différentes.

Ensuite c’est une course contre la montre qui commence car le spectacle est encore loin d’être au point alors que la première représentation approche le samedi suivant. Mais le jour J, le petit miracle habituel se produira malgré les quelques ratés que le public ne percevra pas.
La troupe va donc jouer le spectacle, sur scène, dans les rues en version déambulatoire dans les principales villes du Kurdistan d’Irak : Erbil, Dohuk, Aqra, Shaqlawa, Sulemanye.

Un convoi constitué d’un bus, d’un camion transportant les décors et de la voiture de tête de l’Institut Français qui facilitera les passages aux nombreux check points de l’armée, sillonnera le pays, avec des étapes dans deux camps de réfugiés, dont le plus grand compte 20 000 habitants.


Dans les camps, après avoir joué entourés par des centaines d’enfants avides de rêves et de rires, nous rencontrerons quelques familles habitant ici parfois depuis 2011, ils parleront aussi de leur vie et de leurs espoirs, la plupart sont des kurdes de Syrie ayant fuit la guerre en laissant tous leurs biens et souvent une partie des leurs, ils sont au nombre d’un million pour huit millions d’habitants au Kurdistan Irakien.
Les Kurdes et les Irakiens réagissent généralement au spectacle comme à un exutoire à la guerre sans fin qu’ils connaissent, notamment lorsque celle-ci gronde encore à quelques kilomètres d’eux.


Au cours de la première semaine et de celle qui va suivre sur la route se dessineront les portraits de chaque protagoniste de cette histoire, ses motivations, ses impressions, ses retours d’expérience.
Les étapes du voyage seront ponctuées d’entretiens tournés lors des trajets ou aux étapes, avant et après les représentations, au retour, puis quelques mois après l’aventure. Ces témoignages constitueront la trame du récit.
Celui-ci pourra être enrichi par leurs images tournées avec le petit camescope que j’ai fait circuler entre eux pour qu’ils racontent eux-mêmes une partie de l’histoire, mais il y a aussi les instantanés vidéos pris sur smartphones, les échanges sur les réseaux sociaux…les moyens d’expression propres à cette génération.
A la fin du séjour, les adieux sont déchirants, kurdes et syriens sont inconsolables de voir la troupe repartir alors qu’ils vont retourner à leur quotidien. Mais certains ont déjà des envies, des projets, de nouveaux rêves à réaliser.